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Découverte de la Rome républicaine en 4e et 3e

06 / 12 / 2007 | jmlabat

par Gérald Dubos, professeur au collège des Quatre Arpents
à Lagny-sur-Marne.


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Principes de fonctionnement de l’activité

J’ai conçu ce travail, avant un séjour en Italie, pour aider mes élèves de quatrième et de troisième à préciser leurs représentations de la ville de Rome, à situer dans la topographie qu’ils allaient découvrir les monuments encore existants ou disparus. Il doit en outre permettre une utilisation de la ressource informatique ; la contrainte de sélection des informations peut à cet égard servir de contre-pied au classique " copié-collé " qu’affectionnent les élèves, dans la recherche documentaire par Internet.

Il paraît difficilement envisageable que les élèves mènent ce travail en autonomie complète : il doit se faire en classe. Il est en revanche très simple à concevoir et ne demande qu’à être complété (par les visites d’autres périodes qu’appelle la chute), corrigé, enrichi ou modifié. J’ai en effet imaginé le texte, parfois allusif, pour des élèves que je connaissais bien, qui me connaissaient bien, avec lesquels je travaillais également en français - mais il n’est destiné qu’à donner une forme, une cohérence à l’ensemble.

Ce scénario est à utiliser avec le site Internet dédié à la valorisation de la maquette de Rome par Paul Bigot, accessible à l’adresse http://www.unicaen.fr/rome. Une fois sur le site, par l’onglet " Visite ", on accède à un plan de Rome. En cliquant sur les monuments qui y figurent, on obtient des renseignements précis sur ceux-ci.
Chaque fois qu’un nom de lieu est souligné, il faut le rechercher sur la carte de la maquette (via " Visite") pour accéder à la partie de la maquette où il figure.
Chaque fois qu’un mot du registre de la vision est souligné, il faut rechercher une photographie du monument dans son état actuel, grâce à la rubrique " Aujourd’hui ".
Les points d’interrogation suggèrent des recherches documentaires, le plus souvent (par exemple sur la nature du châtiment réservé aux criminels) dans la rubrique " En savoir plus ", mais parfois dans la rubrique " Textes anciens ".
Certains monuments du Forum, qui ne sont pas figurés activement sur la carte, sont accessibles par la rubrique " Forum romain " des " Visites géographiques ".

Toutes les remarques, les critiques, seront les bienvenues.

Gérald Dubos,
gerald.dubos@laposte.net

 

Déroulement de l’activité

Pour le moment, il faut courir. Vous sentez qu’ils se rapprochent. Vous entendez des cris. Vous ne comprenez pas ce qu’ils disent, mais, au ton employé, vous devinez que ces gens et vous ne serez jamais de grands amis. Vous pourriez presque sentir leurs haleines lourdes souffler sur votre dos. Haleines d’hommes de peu d’hygiène. Surtout le gros, là. Celui qui a un couteau de boucher.

" Qu’est-ce que tu ferais, si tu te retrouvais brusquement projeté à peu près vingt siècles en arrière ? " C’est une question qui ne vous a jamais vraiment intéressé… Vous, vous avez un esprit rationnel ; on dit " positif ", tourné vers ce qui est réel. On dit aussi " manque d’imagination ". Mais c’est moins gentil. Non, cette question ne vous a guère préoccupé, jusqu’à présent. Parce que c’est impossible. Vous le croyiez ; mais c’était avant. C’est-à-dire… " après ".

Tout avait pourtant plutôt bien commencé. Vous aviez réussi à vous isoler un moment des flots de touristes à casquette que l’été romain déverse sur le forum. Vous vous étiez installé un peu à l’écart des voies incontournables, sur le bord du Circus maximus, pour voir cet ancêtre monumental de nos stades, ou plutôt ce qu’il en reste : une empreinte et quelques morceaux de pierre. Le soleil tapait fort. C’était agréable. Vous aviez entre les mains le livre recommandé par votre professeur de latin - un Saylor. C’était parfait. La lecture avançait bien. Trois pizze à midi, c’était quand même peut-être un peu trop. Allongé, c’est sûr, vous seriez mieux. En effet. Très bien. Bien…

Le réveil a été plus brutal, au milieu d’une foule en délire, sur le bord du Circus maximus, ou ce qu’il en restait... Quoique, là, et c’est le problème, il en restait… tout.

Passée la première surprise, une fois écartées les hypothèses rationnelles de la mise en scène hollywoodienne, vous avez dû vous rendre à l’évidence, et vos mésaventures l’ont depuis confirmé : faille temporelle, ou quelque chose de cet ordre, vous aviez chu dans l’antiquité romaine.

Malgré l’invraisemblance, et le danger potentiel, d’une situation qui vous dépassait, vous n’avez pu vous défendre de vous sentir fasciné par l’activité qui vous environnait. A vos pieds, six chars lancés à une folle allure tournaient autour de l’arête centrale. Vous les suiviez du regard, mais votre attention était également happée par les proportions monumentales des lieux ; à première vue, plus de 100 000 spectateurs pouvaient s’entasser sur les gradins de bois et de pierre. A l’extrémité du cirque qui se trouvait sur votre gauche, un arc triomphal ouvrait sur la ville. Vous vous êtes alors rendu compte que vous ne saviez pas quand vous vous trouviez. Il fallait se concentrer : certains détails ne pouvaient-ils pas vous aider à le déterminer ?

Vous n’avez cependant guère eu le temps de réfléchir : malgré l’intérêt qu’ils accordaient à la course, vos voisins commençaient à vous regarder d’un drôle d’air. Le complet-toge prête généralement à sourire, mais en l’occurrence, vous sentiez que votre allure, pourtant très prisée des cours de récréation, passait mal. Vous vous êtes éclipsé. Il fallait trouver une solution.

Vous vous êtes dirigé au nord-est, dans la direction où aurait dû se trouver le Colisée. Mais il ne s’y trouvait pas. Vos calculs antérieurs se confirmaient : vous n’étiez pas tombé dans l’Empire. Vous avez repris un maigre espoir, en pensant qu’au moins vous échapperiez aux lions…

Sur votre gauche s’est soudain ouverte la perspective du Forum, que vous aviez visité la veille. Votre incursion vous avait laissé l’impression d’une accumulation architecturale étourdissante. Mais là… la petite vallée était grouillante d’activité. On criait de toutes parts ; chacun vaquait à ses occupations sans prendre garde aux autres. Vous avez même failli vous faire renverser par un attelage filant à peu près aussi vite que les chars du cirque ; une vestale, sans doute.

Comme la veille, comme plus de deux millénaires plus tard, pour être exact, vous avez suivi la via Sacra. Vous avez vite constaté que certains monuments " manquaient ". Evidemment, le Capitole, dont vous aviez eu l’occasion d’admirer la statue équestre de Marc Aurèle, fermait la perspective. Splendide. Mais votre premier mouvement d’enthousiasme a été vite refroidi à l’idée du sort qui vous attendait : ne risquait-on pas, du haut de cette colline, de vous faire subir la cruelle peine capitale ? Il ne fallait pas y penser ; vous avez décidé d’aborder plutôt ce saint des saints romains en général triomphateur.

Dominant ce cœur de l’Urbs, le temple de Jupiter, surmonté d’un quadrige en bronze, vous semblait véritablement imposer à l’ensemble de la cité l’autorité de ses trois divinités. Vous vous demandiez laquelle implorer ; Junon vous paraissait la plus aisée à fléchir, mais vers quelle cella vous tourner ?

Un ordre rageur vous a arraché à votre rêverie : vous n’aviez pas vu que vous étiez sur la route d’une magnifique litière, qui longeait la maison des Vestales. La veille, vous aviez eu quelque peine à discerner la forme exacte du bâtiment, mais c’est désormais la vie austère de ces jeunes femmes qui vous préoccupait : certes, ces gardiennes de la flamme étaient presque des personnages sacrés, mais la dureté de leur existence et, surtout, les châtiments qui les menaçaient n’étaient-ils pas une atroce contrepartie ?

En passant entre la Regia et le temple de Vesta, dont vous aviez déjà admiré les ruines, vous étiez déjà revenu à votre rêverie ; vous pensiez à ces vers d’Ovide, évoquant l’incendie qui faillit détruire le temple. " La flamme profane se mêlait à la flamme sacrée ". Quel était le texte latin, déjà ?

Vous étiez à présent sur un espace plus ouvert. Mais l’activité y était peut-être plus étourdissante encore : des ouvriers circulaient de toutes parts, méritant la comparaison trop facile avec les industrieuses fourmis. Un vaste bâtiment rectangulaire commençait à prendre forme. Sans doute la basilique Aemilia, dont vous gardiez en tête quelques images. Cette circonstance ne confirmait-elle pas vos hypothèses sur la date de votre chute temporelle ?

Vous commenciez à vous sentir vraiment bien. Un touriste bénéficiant du plus extraordinaire séjour qui se puisse imaginer. Une espèce de fièvre de puissance s’était lentement emparée de vous au cours de cette promenade exceptionnelle. Face à vous, le temple de la Concorde, dont la vue serait d’ici quelques siècles - vous étiez seul à le savoir - masquée par l’arc de triomphe de Septime Sévère. Tout le monde ignorait encore, autour de vous, le nom de l’orateur qui y prononcerait, cent ans plus tard, certains de ses plus célèbres discours. Tout cela vous appartenait : vous en maîtrisiez non seulement les causes, mais aussi le devenir. Si vous avanciez jusqu’au temple de Saturne, lequel de ces individus, qui semblaient tous être une émanation de votre imagination désormais si fertile, vous empêcherait de mettre la main sur son contenu ?

C’est alors que vous avez commis une erreur. Au moment où vous commenciez à vous croire un dieu, vous vous êtes rendu compte que vous aviez faim - les dieux ont bien soif ! Quid faciam ? Les euros n’ont pas cours, deux mille ans avant leur création. Il fallait bien manger. Un marchand passait par là…

A présent, il faut courir. Vous ne savez pas pourquoi, mais il vous semble que si vous atteignez le pont Sublicius, les choses pourront peut-être s’arranger. Vos idées se troublent. Vous ne savez plus très bien : quel héros s’est-il illustré sur ce pont ? Vous êtes las. Vous tombez. Tout devait donc finir ainsi… Vous fermez les yeux, pour sentir moins douloureusement le coup venir. Mais le coup ne vient pas.

 

 
Directeur de publication :
A. David
Secrétaire de rédaction :
C. Dunoyer

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