Objet d’étude : la poésie (1re)
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par Bernard Martial, professeur au lycée Langevin Wallon
de Champigny-sur-Marne (94)
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Textes
Texte 1 : Tristesse , Alfred de Musset J’ai perdu ma force et ma vie, Quand j’ai connu la Vérité, Et pourtant elle est éternelle, Dieu parle, il faut qu’on lui réponde. |
Texte 2 : Sagesse, Paul Verlaine Le ciel est, par-dessus le toit, La cloche, dans le ciel qu’on voit, Mon Dieu, Mon Dieu, la vie est là, -Qu’as-tu fait, ô toi que voilà |
Texte 3 : Vitam impendere amori, Guillaume Apollinaire Ô ma jeunesse abandonnée Le paysage est fait de toiles Un froid rayon poudroie et joue La vitre du cadre est brisée Ô ma jeunesse abandonnée
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Texte 4 : Hommage à la vie, Jules Supervielle Ce texte, qui est toujours sous droit d’auteur, ne peut être reproduit ici. |
Ecriture
A. PREMIERE PARTIE : QUESTIONS COMMUNES (4 points)
En vous appuyant sur les quatre textes du corpus, vous répondrez d’abord à la question suivante :
En quoi le dernier poème s’oppose-t-il aux trois autres ?
Ne vous contentez pas pour répondre de recopier les extraits du texte ou d’étudier les textes un par un. Chaque réponse doit être structurée et argumentée selon un plan thématique et non une étude linéaire.
B. DEUXIEME PARTIE : SUJET AU CHOIX (16 points)
Vous traiterez l’un de ces trois sujets (précisez le sujet choisi au début de votre copie)
Sujet I : COMMENTAIRE DU TEXTE 4 (Supervielle)
Vous ferez le commentaire composé du texte de Jules Supervielle (Hommage à la vie)
Sujet II : DISSERTATION
Pensez-vous qu’on puisse limiter le domaine de la poésie à l’expression des sentiments mélancoliques ?
Sujet III : INVENTION
Pour la rubrique du courrier des lecteurs d’un hebdomadaire destiné aux adolescents, vous écrivez une lettre où vous soutenez qu’un jeune d’aujourd’hui peut encore aimer lire ou écrire des poèmes.
Commentaire du poème de Supervielle
Dans ses poèmes, Jules Supervielle exprime souvent l’émerveillement de vivre et d’ouvrir les yeux à la réalité, en particulier dans « Hommage à la vie » dont il justifie le beau titre non seulement par un hymne à la vie et un hymne à l’univers, mais aussi par la ferveur de cet hommage.
1. L’hymne à la vie
Jules Supervielle commence son poème par la célébration du miracle de la naissance et de la vie. Contrairement aux romantiques qui maudissaient le jour de leur naissance et reprochaient à leurs parents de leur « avoir infligé la vie [1] »(Chateaubriand), il n’a pas hésité à présenter la naissance comme un choix, fût-ce au prix d’une entorse à la réalité. Il utilise en effet la métaphore de l’élection d’un « domicile », prolongée par le verbe « loger », et établit un lien étroit entre le corps « vivant » et l’organe qui maintient ce corps en vie, le « cœur continu ». Cet adjectif inattendu s’explique par la proximité de « temps » : la continuité de la vie est assurée par les battements du cœur. Cette conscience d’un miracle ne vient que tardivement chez l’homme : au contraire, la découverte de l’amour coïncide souvent avec la conviction de vivre un événement exceptionnel.
L’amour apparaît sous trois formes différentes, mais complémentaires. D’abord il « donne visage » à des mots restés abstraits jusque-là, « femme-enfants ». La suppression de l’article devant « visage » rend plus émouvant ce qui fait de chacun un être unique, à nul autre semblable, son visage, et tout particulièrement le visage des êtres chers. L’amour donne aussi des racines, comme le suggèrent les rimes croisées : « visage »/ « enfants »/ « rivage »/ « continent ». En effet, le rapprochement de « continents » et de rivages » n’est ni fortuit ni purement métaphorique : l’écartèlement entre deux patries, deux continents et deux cultures, la française et celle de la « pampa », a fait souffrir Supervielle dès sa plus tendre enfance (il perdit ses parents à huit mois), et l’a condamné à l’errance sa vie durant. L’amour enfin est une union des âmes, une quête de spiritualité. Pour exprimer cette conception exigeante de l’amour, il a recours à l’image de la navigation (« à petits coups de rame »), et crée le néologisme « une approchée ». La tendresse, la douceur, la délicatesse du sentiment amoureux sont également connotées par le verbe « ne l’effaroucher », qui suggère les tentatives faites pour apprivoiser un animal, et traduites par le rythme régulier des hexasyllabes, comme autant d’approches successives, timides, pleines d’élans contenus.
Après la plénitude de l’âge mûr, la vieillesse est évoquée par des couleurs plus sombres (« ombre », « sang noir »), l’image de la reptation, un enjambement et le rejet de « ramper » au début du vers 28. Mais le poète accepte les disgrâces de la vieillesse comme un phénomène naturel, comme l’autre versant de la vie, ce que symbolise « l’ombre sous le feuillage » au vers 26 et qu’affirme la phrase marquant l’ouverture de ce deuxième mouvement : « C’est beau d’avoir connu ». Il ne se révolte pas et ne revendique pas une éternelle jeunesse.
2. L’hymne à l’univers
Que serait une vie d’homme sans la découverte du monde ? Conscient de la richesse de l’univers, plein d’admiration pour ce que Descartes appelait « le grand livre du monde », Supervielle consacre les vers 5 à 16 à la découverte du monde, puis condense encore ces douze vers à la fin du poème en un seul : « D’avoir senti la vie ». La connaissance du monde s’accomplit en deux temps : d’abord l’exploration de l’espace par les sens, puis l’investigation du passé par la mémoire
[1] « Après le malheur de naître, je n’en connais pas de plus grand que celui de donner le jour à un homme » Mémoires d’Outre-Tombe.
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