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La classe accompagnée pour lire Boule de Suif : quand les élèves construisent la séquence

11 / 09 / 2018 | le GREID Lettres

Niveau(x) : seconde mais adaptable à n’importe quel niveau
Durée : un peu plus d’un mois

Objectifs :

  • rendre les élèves acteurs dans la construction de la séquence
  • développer l’autonomie des élèves
  • développer la coopération entre élèves
  • donner de la place aux souhaits des élèves pour les aider à s’approprier le texte

Supports  :

  • Boule de suif de Maupassant

Outils numériques :
- Padlet
- Vidéo-projecteur
- connexion internet

Démarches et activités :

  • travail en groupe
  • recherches autour de notions littéraires et de connaissances nécessaires à la compréhension du texte
  • commentaire construit en groupe
  • activité créative autour du texte

Apport spécifique du numérique :

  • le numérique sert essentiellement dans cette séquence à collecter les travaux des uns et des autres afin d’en garder la trace

Déroulement du projet

Je me suis lancée dans un projet de classe « inversée » ou plus précisément, dans mon cas, « accompagnée » poussée par une classe de seconde très hétérogène mais montrant beaucoup de bonne volonté et une énergie inépuisable. A la fin du 2e trimestre, comme nous avions déjà pris de nombreuses habitudes de travail, notamment de travail en groupe, j’ai estimé pouvoir leur confier la construction de la séquence sur Boule de Suif que je leur avais déjà demandé de lire.

J’ai commencé par élaborer un questionnaire concernant les éléments nécessaires pour étudier cette œuvre :


Ce questionnaire visait à faire émerger les connaissances nécessaires à acquérir pour mieux comprendre l’oeuvre et donc l’étudier plus efficacement, à mettre en évidence les compétences mobilisées dans les activités proposées mais aussi à recueillir les envies des élèves en relation avec l’œuvre. Il permettait également de lever certains malentendus à propos des représentations qu’ont les élèves de notre discipline.
Je leur ai d’abord soumis individuellement le questionnaire en l’affichant au tableau et en les laissant réfléchir et répondre sur papier. Puis je les ai invités à se mettre en petits groupes, à mettre en commun leurs réponses, à échanger et à négocier une réponse commune qu’ils ont ensuite reportée sur le questionnaire en ligne.
 

A la séance suivante, j’ai projeté leurs réponses afin de commencer à programmer ensemble la séquence.

Nous avons pu voir qu’il y avait des constantes dans leurs réponses et les avons surlignées de la même couleur. Nous avons ainsi dégagé ensemble qu’ils allaient devoir acquérir des connaissances concernant le contexte historique de l’œuvre en particulier sur la guerre franco-prussienne, le paysage social de l’époque, les notions littéraires de réalisme et de naturalisme. La classe a souligné qu’il faudrait peut-être aussi se documenter sur l’auteur afin de connaître mieux sa vie, son œuvre, de savoir quand et comment il en était venu à écrire ce texte, s’il faisait écho à d’autres, s’il avait un style d’écriture particulier.

Nous avons fait ensemble le point sur les endroits où collecter ces connaissances en nous souvenant de toutes les ressources que nous avions utilisées pour cela depuis le début de l’année : le manuel bien sûr, le CDI, Internet en choisissant les sites avec vigilance et en vérifiant leur sérieux, l’éventuelle bibliothèque des parents, des membres de la famille, le dossier inclus dans l’édition choisie qui traite un certain nombre de ces points.
J’ai alors demandé aux élèves de se mettre en petits groupes en fonction des sujets qu’ils souhaitaient traiter et de se répartir le travail. Un même sujet pouvait bien sûr être traité par plusieurs groupes, pourvu que tous les sujets soient traités au moins une fois. La forme du traitement était libre, ce pouvait être un texte, un diaporama, une carte mentale, ou tout autre forme : l’essentiel était le contenu et non la forme. Les élèves avaient ensuite 15 jours pour traiter leur sujet en groupe et chaque groupe devrait venir exposer à la classe un compte rendu de ses recherches et mettre à la disposition de tous ses notes.

Dans la question portant sur les activités, outre les classiques commentaires et analyses de textes, est apparu de façon très prégnante le travail de groupe, ce qui s’accordait bien avec mon projet qui incluait que les élèves travaillent quasiment exclusivement en groupes sur ce projet.

Enfin, j’avais posé la dernière question, celle portant sur ce qu’ils aimeraient faire, afin de pouvoir leur proposer en fin de séquence un travail créatif plus libre que les exercices traditionnels. Il me fallait donc recueillir leurs idées et surtout ne pas les oublier pour pouvoir leur proposer réellement ce travail en fin de séquence. Cette question les a beaucoup déstabilisés, car il n’est pas si courant qu’un professeur leur demande ce qu’ils voudraient faire sur un sujet donné (« Madame, on pourrait écrire une chanson et la chanter ? » Pourquoi pas ?). On peut voir à leurs réponses que les idées ne manquent pas !

En parallèle de ce début de défrichage, je leur ai soumis un second questionnaire portant sur le choix des textes à étudier, en sachant que nous allions étudier ensemble l’incipit, qui était donc exclu du choix. Je leur demandais de choisir librement quatre passages dans le roman qu’ils jugeaient utiles d’étudier en indiquant les références de début et de fin, en donnant un titre pour les obliger à cibler l’essentiel de l’extrait et surtout en justifiant leur choix, ce qui était déjà un début d’étude du texte.

Nous avons ensuite confronté les réponses des groupes et regardé quels étaient les quatre textes qui emportaient l’intérêt de la classe. Nous avons lu et discuté en classe entière des justifications données par les différents groupes pour le choix des textes et constaté que ces justifications étaient déjà des axes d’étude pour l’oeuvre. Nous avons aussi dû trancher sur le début et la fin de chaque texte.

Pour répartir les études de textes, j’ai opté pour un tirage au sort afin que cela reste neutre et afin de pouvoir maintenir les groupes de recherche tels quels car cela facilitait le rythme de travail tel que je l’imaginais. Sans doute d’autres dispositifs seraient intéressants pour avoir des groupes à géométrie variable. Chaque groupe a pris en charge un texte, et, comme pour les sujets de recherches, plusieurs groupes pouvaient étudier le même texte. Les quatre textes retenus, en plus de l’incipit étudié ensemble, ont été : le portrait des voyageurs au début du voyage ; le premier repas dans la diligence ; le repas à l’auberge qui tourne au complot contre Boule de suif ; la fin de la nouvelle.
De la même façon que pour les connaissances nécessaires à l’étude, chaque groupe devrait venir présenter un plan détaillé d’étude du texte et mettre son plan à la disposition de la classe.

J’ai donné à la classe une dizaine de jours pour faire leurs recherches sur les connaissances à acquérir et un peu plus de temps pour produire un plan détaillé d’étude de texte. Les élèves ont alors travaillé en autonomie pendant tous les cours, soit sur leur exposé, soit sur l’étude du texte, souvent (mais pas tout le temps) dans une salle équipée d’ordinateurs pour faire des recherches et pour saisir leurs notes. Ce même travail peut aussi bien être mené sur des outils mobiles (classe mobile, flotte de tablettes, smartphones des élèves) si l’on ne dispose pas d’une salle multimédia. J’ai circulé parmi les groupes pour m’assurer que le travail était compris, avançait bien et dans la bonne direction, j’ai regardé leurs plans, les ai réorientés parfois, ai conseillé certains sites, ai attiré leur attention sur certains points. J’ai insisté sur le fait que le travail devait aussi avancer en dehors du cours, en particulier s’ils avaient besoin d’aller travailler au CDI.

J’ai mis à la disposition de la classe un Padlet afin que chaque groupe puisse y déposer ses propres notes, soit en cours de travail, soit seulement une fois le travail abouti : https://padlet.com/cdunoyer/Boule_de_suif_203

Au bout de dix jours de travail, chaque groupe a été invité à venir présenter le bilan de ses recherches. Chaque élève du groupe devait s’exprimer. Après chaque présentation, pendant laquelle la classe devait prendre des notes, un temps était consacré aux questions en particulier pour clarifier comment ces connaissances pouvaient éclairer la lecture du texte, en faciliter la compréhension. Il est ainsi apparu clairement que le groupe ayant travaillé sur la guerre franco-prussienne n’avait pas suffisamment efficacement trié les informations à récolter : certains élèves qui avaient travaillé de façon indépendante sur le sujet, en particulier en lisant le dossier contenu dans l’édition utilisée, ont souligné qu’il aurait surtout été utile de savoir comment les troupes prussiennes avaient progressé sur le territoire français parce que ces mouvements se retrouvent dans le texte de Maupassant. J’ai demandé à certains groupes de bien vouloir reprendre et améliorer leur exposé en tenant compte des remarques faites par la classe et par moi-même dans le document qu’ils mettaient à la disposition de la classe. Certains l’ont fait, d’autres non.

Ces exposés ont pris du temps (presque 3 heures) car il fallait du temps de discussion et de questions après chaque exposé. Les questions ont été d’autant plus intéressantes que les élèves ressentaient le besoin d’avoir certaines informations pour mieux comprendre des éléments du texte.

A ce moment de la séquence, le travail sur les textes était déjà commencé pour tous les groupes, qui ont pu poursuivre leur étude de texte pendant environ une semaine encore. Chaque groupe est ensuite venu présenter son étude selon les mêmes modalités que pour les exposés de connaissances : chaque élève devait parler. Le plan de l’étude devait par ailleurs être inscrit au tableau sur un fichier numérique afin que chacun puisse le retrouver sans peine. Avant chaque présentation, je donnais à la classe le temps de relire le texte et un petit quart d’heure pour poser sur papier quelques notes sur le texte afin que la proposition des élèves ayant travaillé le texte puisse être confrontée aux idées de la classe. Il était clair pour tout le monde que je ne ferais pas de reprise (je m’étais assurée que les diverses propositions rendraient compte, d’une manière ou d’une autre, de l’essentiel de chaque texte), juste d’éventuels éclaircissements. La classe devait donc prendre des notes pendant le temps des exposés comme ils le feraient pendant un cours assuré par le professeur. Ce dispositif a d’ailleurs permis de rendre la classe très active dans l’écoute des propositions de leurs camarades.
Plus encore que les exposés, les études de textes ont pris du temps, ce qui est normal parce que la classe a été très investie dans les questions et remarques diverses après chaque proposition. La classe a estimé que certaines propositions de lecture méritaient encore d’être travaillées et a proposé que certains élèves puissent passer d’un groupe à un autre pour aider à mettre en œuvre cette amélioration. Le travail a été fait, mais les groupes n’ont pas toujours mis sur le Padlet la version améliorée jusqu’au bout.

Chacun de ces exposés oraux a donné lieu à une note attribuée au groupe.

Une fois toutes les études de textes faites, j’ai rappelé aux élèves la dernière question de mon questionnaire : « Qu’aimeriez-vous faire ? ». Je leur ai annoncé que la dernière évaluation serait une création libre. Ils devaient, seuls ou en groupe, rendre compte du texte ou d’un extrait du texte, de la façon qu’ils voulaient : BD, interview, vidéo, mise en scène, danse, chanson, etc. Il leur faudrait venir, au bout d’une semaine, présenter leur création devant la classe en justifiant leurs choix. J’ai créé un second Padlet pour pouvoir accueillir ces créations. Les productions ont été variées : un carnet de dessin des personnages, une allégorie, un poème et son accompagnement à la flûte, un second poème, une adaptation en BD du passage du repas dans la diligence, une adaptation en BD du début de la nouvelle, une interview de Boule de suif (façon « Faites entrer l’accusé »), une chanson.

La plupart des élèves ont travaillé en groupe, mais quelques-unes ont préféré travailler seules et ont présenté un travail très personnel. Chaque groupe a fait l’effort d’expliquer ses choix, à la fois le choix du passage de l’œuvre retenu et aussi le choix du support artistique.

L’évaluation concernant les deux premiers exposés a porté sur plusieurs points : la qualité de contenu mais aussi sur la qualité de transmission orale. Pour les groupes pour lesquels ça a été nécessaire, j’ai également pris en compte l’amélioration, dans un second temps, de leur exposé ou de leur étude, en tenant compte des remarques faites par moi et par la classe. Enfin, une note particulière a été réservée à la production finale, tenant compte de la créativité de la production, de la justification des choix faits, du respect du texte d’origine.

 
Directeur de publication :
A. David
Secrétaire de rédaction :
C. Dunoyer

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